Carrière fulgurante avec un handicap

Norbert Forster a en effet fait une longue carrière à Rossfeld près de Berne. Le centre de formation et d’hébergement de Rossfeld offre aux jeunes handicapés physiques la possibilité de suivre une formation commerciale du même niveau que celle d'une école régulière. Depuis dix ans, Norbert Forster dirige le département commercial, là où il a commencé son apprentissage il y a 28 ans.

Norbert Forster a grandi à Andwil, un petit village de Saint-Gall. Enfant, il a déjà besoin d’un fauteuil roulant à cause d’une raideur articulaire congénitale et doit subir de nombreuses interventions chirurgicales. Ça ne l’empêche pas d’aller à l’école publique. « J’étais très bien intégré à l’école », se souvient cet homme de 47 ans, « mais chercher un apprentissage a été beaucoup plus difficile. »

Fils d'agriculteur, il aurait aimé rester dans sa ferme natale, mais son corps lui a imposé des limites. « Pour les nombreux travaux manuels à la ferme, mes mains étaient trop peu mobiles. » Le service d'orientation professionnelle de l'AI lui recommande alors de s’installer à Berne pour y effectuer un apprentissage commercial à Rossfeld.

Rossfeld offre la possibilité aux personnes en situation de handicap d'habiter, d'aller au jardin d'enfants ou à l'école, de faire un apprentissage ou de fréquenter l'école professionnelle, le tout au même endroit. « Ici, j’ai pris confiance en moi et je me suis rendu compte pour la première fois que je savais faire quelque chose. » Après son apprentissage, ce jeune homme de 24 ans n’a pas à chercher longtemps un emploi. Encore une fois, la chance lui sourit. 

Quand le foyer Rossfeld a été créé il y a 50 ans, les rôles étaient clairement répartis : tous les employés n’étaient pas handicapés, tandis que les élèves en situation de handicap n’avaient droit qu’à un emploi protégé. « Après un changement de direction, Rossfeld a changé sa politique du personnel et a commencé à embaucher des personnes en situation de handicap », explique Norbert Forster.  

Au milieu des années 1980, l’apprenti de Rossfeld est embauché comme « responsable informatique » et peut pleinement exploiter son affinité pour l’informatique sur son lieu de travail. En plus de son travail, il continue de se former et passe l’examen de comptable diplômé fédéral en 2000. 

Aujourd’hui, Norbert Forster dirige le département commercial de Rossfeld. L'apprentissage commercial à Rossfeld offre aux apprenants la possibilité de suivre la formation théorique à l’école professionnelle et la formation pratique dans l’entreprise d’apprentissage interne. Avec les spécialités « secrétariat », « saisie de texte », « traitement de texte », « édition assistée par ordinateur » et « fiducie », l’entreprise formatrice propose une offre de formation variée. Les apprentis disposent d’un internat avec trois habitats groupés. Sans oublier l’ergothérapie et la physiothérapie qui complètent l’offre globale. Une quarantaine d’apprentis suivent actuellement à Rossfeld la formation de quatre ans avec diplôme fédéral pour devenir employés de commerce, profil E ou profil B.  

Le département commercial compte une trentaine d’employés, dont environ un tiers sont des formateurs handicapés physiques. La coopération entre employés handicapés et non handicapés se déroule sans heurts. Pourtant, il sait qu’il y a des différences. « Je pense que beaucoup de personnes en situation de handicap doivent faire beaucoup plus d’efforts dans leur vie professionnelle. » Le trajet domicile-travail compliqué, les thérapies à suivre en plus du travail, les obstacles dans les entreprises et surtout les préjugés des collègues sont autant d’obstacles à surmonter. « C’est un défi de réussir à tout gérer », dit Norbert Forster. Son exemple montre qu'on peut faire carrière même avec un handicap. Les conseils de N. Forster sont simples : « Ma vie professionnelle montre que travailler peut être très gratifiant même si l'on n'a pas pris la voie qu'on souhaitait au départ. » Sans oublier que le fait d'être lent au travail se compense facilement en travaillant avec plus de précision. Et enfin, selon lui; les personnes en situation de handicap devraient choisir leur nombre d'heures de travail de manière à ce que ça les stimule sans les dépasser.