Compétences professionnelles exceptionnelles

L’intégration des personnes en situation de handicap mental ou physique a été perçue par l'économie et le grand public au plus tard au moment de la 5e et de la 6e révision de l’AI. Concrètement, il s’agit de réintégrer des milliers de rentières et rentiers AI sur le marché du travail. Cette démarche s’inscrit dans le cadre de l’épuration de l’assurance-invalidité fortement endettée (en savoir plus sur l'AI).

Du point de vue de l’État et de l’économie, il faut aller plus loin, c’est-à-dire passer de l’« invalidité », du « handicap » ou de la « limitation » à l’utilisation des capacités spécifiques de ce groupe cible. Et pour les personnes concernées elles-mêmes, il ne s’agit pas de savoir comment leur donner un nom politiquement correct, mais plutôt d’utiliser leurs « abilities » pour au moins acquérir ou conserver une certaine autonomie, trouver un environnement social et renforcer leur confiance en soi.

Les capacités particulières des personnes en situation de handicap sont incontestables et scientifiquement prouvées. Les personnes en situation de handicap peuvent fasciner par certaines aptitudes particulières, si elles sont reconnues et encouragées.

L’expérience montre que les personnes en situation de handicap possèdent en général des aptitudes particulières telles qu'une flexibilité et une endurance exceptionnelles. De nombreux malvoyants par exemple savent écouter de manière particulièrement concentrée et attentive et travaillent donc souvent dans des centres d’appels. Une étude récente de l’université de Georgetown à Washington montre que les aveugles utilisent, dès leur naissance, les zones cérébrales affectées à la vision pour sentir et entendre. 

Ces capacités tactiles particulières sont par exemple utilisées pour la palpation mammaire chez la femme, une opération complexe et difficile. « Les médecins arrivent à identifier des nodules d’un diamètre d’environ 10 millimètres. C’est ce que disent les statistiques et cela correspond aussi à mon expérience personnelle. Les palpeuses médicales ont la capacité de détecter des nodules entre 4 et 6 millimètres », explique le gynécologue de Duisbourg, le Dr méd. Frank Hoffmann. Les cabinets de massage peuvent également profiter de cette capacité de perception accrue des aveugles ou malvoyants. Dans le cabinet « des mains qui voient » à Winterthour par exemple, tous les masseurs et masseuses médicales avec un brevet CRS sont malvoyants ou aveugles.

Mais il existe d’autres moyens de travailler dans le domaine de la santé. En Allemagne par exemple, un projet pilote a été mis en place, appelé Healing Animator, une formation pour devenir animateur de soins. Ce nouveau profil professionnel a pour but de compenser l’allongement général de la durée de vie et d'alléger le travail de soins dans les maisons de retraite. L’animateur de soins stimule le processus d’auto-guérison et améliore la qualité de vie des personnes concernées grâce à la communication, la compassion et l’humour. Ainsi, la gélotologie (science de l’humour) encourage un recours accru à l’humour dans les soins autant pour les personnes touchées que pour le personnel soignant. Les personnes atteintes du syndrome de Down démontrent des capacités supérieures à la moyenne dans ce domaine : elles se révèlent être des personnalités sûres d’elles-mêmes avec leurs propres intérêts et envies. Elles font preuve de compétences sociales, d’ambition, de ténacité et de joie de vivre. Et elles séduisent par leur charme unique.   

Les personnes avec des problèmes de langage par exemple peuvent s'avérer être d'excellents rédacteurs, journalistes, webdesigners ou programmeurs. Il faut juste que leur travail ne dépende pas d'une communication instantanée directe, en sachant qu'avec les nouveaux moyens de communication, ce problème n'en est plus vraiment un. En cas de restriction de l’appareil locomoteur, l’accessibilité du poste de travail est primordiale. Si un collaborateur se sent à l’aise dans un lieu de travail idéal, l’expérience montre qu’il fait preuve d’un engagement et d’une continuité exceptionnels. De nombreux malentendants quant à eux doivent bien observer leur environnement. Ils sont donc particulièrement aptes à piloter des machines avec beaucoup d'attention.

Le développement des technologies de l’information a ouvert de nombreuses possibilités. L’internet a changé le monde du travail en général, et il représente un grand soulagement pour les personnes à mobilité réduite dans de nombreux domaines, y compris professionnels. Grâce à l’informatique moderne, de très nombreuses professions peuvent être exercées à domicile, en quel cas il faudra beaucoup de rigueur. Ce type de travail ne tient toutefois pas compte des aspects sociaux, qui revêtent une grande importance pour les personnes concernées.

L’ère de l’information met également l’accent sur les points forts et les talents exceptionnels des personnes avec un handicap d'Autisme Asperger. En effet, à l’ère de l’information, les compétences spécifiques de ces personnes peuvent souvent constituer des conditions idéales pour les métiers de l’informatique. Les personnes Asperger ne sont pas seulement très douées, elles disposent aussi d’un sens analytique exceptionnel, d’une belle vivacité d’esprit, d’une grande précision dans les détails, d’une extrême capacité de concentration ainsi que d’une ténacité et d’une endurance remarquables. 

Les capacités intellectuelles qui permettent aux personnes atteintes du syndrome d’Asperger de saisir et de comprendre des questions complexes et des sujets difficiles à une vitesse incroyable, associées à leur forte motivation et à leur ténacité à traiter un sujet pendant des semaines, des mois, voire des années, leur permettent d’atteindre un niveau de connaissance et de spécialisation très élevé. En revanche, leurs faiblesses en matière d’interaction sociale n’ont que peu ou pas d’importance lorsqu'il s'agit de tester des logiciels ou pour le web design.

Les personnes en situation de handicap sont de plus en plus qualifiées, du moins du point de vue institutionnel, « de talents différents » ou de « personnes dotées de capacités particulières ». Mais il ne faut pas s'arrêter là et exploiter ces talents, dans l’intérêt des personnes concernées, de l’économie et de l’État. La question doit donc être de savoir ce que les personnes en situation de handicap peuvent faire, et non ce qu’elles ne peuvent pas faire.